La nouvelle ère sera-t-elle celle de la digitalisation de tous les circuits financiers de l’État ?

Il n’est un secret pour personne qu’une bonne gestion des recettes publiques va indubitablement permettre la constitution de fonds conséquents pour financer des infrastructures qui vont à leur tour soutenir la croissance économique du pays. Les efforts pour parvenir à une meilleure gestion de nos finances doivent, à n’en point douter, concerner en premier lieu les régies financières et toute fonction de collecte de recettes publiques. L’une des solutions qui pourrait concourir à cette finalité serait la digitalisation de tous les services du ministère des Finances, de manière à rendre la gouvernance plus transparente, c’est-à-dire qu’à chaque réception de recette quelconque, un avis d’acquisition soit signalé à qui de droit dans la chaîne de la hiérarchie du ministère et de ses institutions.
Inversement, toutes les dépenses publiques doivent également suivre un processus informatisé notifiant les chaînes autorisées de la hiérarchie de toute sortie du denier de l’État. Le ministère en charge des Finances a déjà commencé, dans le cadre de ses réformes, la digitalisation de ses différents services, mais ces efforts salutaires doivent être accélérés et étendus à toutes les régies et fonctions de collecte de recettes publiques du pays. Cependant, la digitalisation du circuit de dépenses et de collecte de recettes seule ne suffirait pas pour réduire l’hémorragie financière de l’État. Le gouvernement doit réfléchir à un système de garde-fous à tous les niveaux de ces circuits. Par exemple, un transitaire et un agent de douane véreux pourraient facilement profiter de la faille du système pour sous-évaluer les marchandises d’un container. L’agent de douane et le transitaire pourraient illégalement empocher des millions de CFA qui devraient autrement aller dans les caisses de l’État.
L’autre perdant dans ce deal serait le commerçant qui aurait payé l’entièreté des frais de douane de ses marchandises au transitaire véreux qui partagerait le butin avec son complice d’agent de douane véreux. Un autre exemple est celui d’un trésorier payeur ou d’un ministre des Finances qui pourrait facilement autoriser ou instruire un ordre de paiement sans suivre les procédures normales et cela au profit des créanciers nationaux moyennant quelques millions de francs en guise de commissions pour service rendu. Même si le ministère des Finances se digitalise, sans un garde-fou le terrain demeurait toujours fertile à picorer pour n’importe quel individu, soit-il un ministre ou un simple agent. Le garde-fou dont il est question ne serait autre chose qu’une procédure à mettre en place visant à rendre difficile ou presque impossible à un seul individu de disposer de l’autorité exclusive d’émettre la décision ultime occasionnant l’acquisition de recettes ou les dépenses de nos finances sans que les autres membres dans la chaîne hiérarchique n’en soient au courant. L’objectif est, comme nous l’avions déjà souligné, de contribuer à la transparence des décisions. L’Open Service, à travers les logiciels taillés sur mesure pour chaque ministère, vise à rendre la décision et le temps mis pour émettre une décision transparents en mettant au courant toute la chaîne des acteurs concernés par l’activité particulière.
Comment pourrait fonctionner l’Open Service au niveau du ministère ? En effet, afin de fluidifier le processus de requête de dépenses ou de réception de recettes, les individus ayant le pouvoir de décision devraient disposer d’un délai dans lequel ils seraient astreints à faire connaître leur opinion. Grâce au logiciel de l’Open Service, dès lors qu’un acte de dépense ou de réception de recettes est posé, la mise à jour prend subséquemment effet et est perceptible à tous les niveaux de responsabilité. Si un retard est accusé dans le délai imparti pour statuer sur un dossier nécessitant une action d’autorisation de dépense ou attestant une acquisition de recette, le système le fait automatiquement connaître à toute la chaîne des auteurs impliqués et simultanément envoie à la personne responsable dudit retard un rappel automatique, par exemple à chaque trente minutes, jusqu’à ce qu’une suite appropriée soit donnée au dossier en question. Si un dossier est incomplet ou comporte des irrégularités, l’officier peut refuser d’approuver le processus ou rejeter le dossier à condition qu’il le fasse dans le délai imparti en mentionnant clairement la raison de sa décision. Cette procédure de transparence vise à réduire la tentation de bloquer ou de rejeter un dossier ou, inversement, d’approuver une dépense pour des considérations autres que professionnelles et justifiables. Plus un système est transparent, moins la tentation à la corruption est significative. Plus un système est digitalisé, forte serait l’opportunité de renforcer sa transparence. Dans la suite de nos contributions (7e proposition), nous allons nous intéresser à la digitalisation du système de santé publique.