SOCIÉTÉ : CÔTÉ STOCK, LA FIN BRUTALE D’UNE BELLE ÉPOQUE

L’arrivée des téléphones mobiles, ou cellulaires au Tchad, au début des années 2000 a apporté une grande facilité en matière de communication, rapprochant les peuples et permettant d’autres facilités telles que les transferts d’argent. Les gens ont pris l’habitude d’effectuer régulièrement de petites sommes pour dépanner. Pour certains, l’argent destiné à la popote au village se fait également via ce même canal de transfert. De ce fait, nos deux géants, Moov et Airtel, sont devenus incontestablement incontournables.

Malheureusement, cette facilité à laquelle les gens s’étaient habitués a brutalement pris fin sans crier gare un bon matin. Cette mesure d’arrêt a été mise en œuvre sans aucune annonce préalable ni mesure d’accompagnement.

Pour la plupart des usagers, la moindre des choses pour ne pas dire le moindre respect aurait été d’informer les usagers de la disparition de ce “raccourci” de transferts tant prisé par les Tchadiens. À travers ces transferts faciles, les jeunes débrouillards dans les zones urbaines viennent en aide aux parents restés au village. C’est le cas d’Allamine Djimi que notre équipe a rencontré à la gare de Tacha-Mossoro à la sortie nord de N’Djamena. Il témoigne avoir eu toutes les peines du monde pour pouvoir envoyer quelque chose à sa mère. Son cas est similaire à celui d’autres pères de famille qui éprouvent maintenant des difficultés pour envoyer à leurs enfants l’argent de la semaine au village pour le marché hebdomadaire.

Moussa, un autre usager, dit avoir dû recourir à l’ancienne méthode des années 80, “mettre l’argent dans une enveloppe et le confier au chauffeur du véhicule” avec tous les risques de perte que cela implique. À la question de savoir pourquoi il ne passe pas par Moov ou Airtel Money, Moussa évoque la difficulté liée à cette nouvelle technologie qu’il ne comprend pas encore.

D’autres usagers déplorent le manque de communication de ces multinationales qui disposent pourtant de canaux de communication efficaces pour annoncer ce changement. Ils qualifient cette attitude de mépris à leur égard en tant que clients et citoyens. Ils rappellent qu’une décision d’une telle ampleur ne devrait pas être prise à la légère ni dans la précipitation. Des annonces et des mesures d’accompagnement devraient nécessairement la précéder. Décidément, le client ne semble pas être roi chez Moov et Airtel.

Mais quels sont le mobile et l’opportunité d’une telle décision brutale et qui en était l’instigateur ? Ce sera l’objet de notre prochain article.

Moustapha Hamid Markass