#OPINION ✍️ : Quelle administration publique pour la 5e République ?

Par Moustapha Abakar Malloumi

Archimède, le mathématicien grec, aurait confié :” donnez-moi un appui et je souleverai le monde”. Chez nous, si nous pouvons nous appuyer sur une fonction publique performante, nous saurions déplacer le Tchad vers son émergence.

Le Tchad de l’émergence est possible si je me permets de solliciter votre attention, un temps soit peu, pour la focaliser sur le travail que les employés locaux abattent dans les sociétés étrangères installées au Tchad. Vous auriez dû vous rendre compte de l’excellent niveau de productivité et de réalisation des résultats de ces compatriotes exerçant dans les sociétés étrangères ou dans des organisations internationales en opération chez nous.
Pourtant ils sont pour la plupart nantis des mêmes diplômes voire sortis des mêmes écoles que leurs concitoyens de l’administration publique. Où se trouve alors le problème dans la performance des agents de la Fonction publique?

A notre humble avis, le problème est à fouiner dans le mécanisme devant encadrer le travail dans l’administration publique. Il faut un bon “process” qui suit, évalue, corrige et améliore la qualité du rendement de chaque individu. De plus, il faut faire en sorte que l’individu (le commis de l’Etat) soit dissocié de la fonction qui livre le service. A cet effet, le process doit prévoir au moins un “back up” (un suppléant qui n’est autre qu’un individu assurant déjà une autre fonction dans la boîte) pour chaque fonction qui preste un service. Le process assurerait ainsi aux usagers un service à temps plein dans l’administration publique tous les jours ouvrables. Par exemple, si quelqu’un se pointe pour un service dans une institution publique, il doit obligatoirement être servi même si le responsable du bureau est indisponible ou carrément absent puisque le process a déjà prévu quelqu’un d’autre pour combler le vide en attendant.

Le Tchad de l’émergence est donc possible et même très possible mais probablement non avec le type de l’administration publique que nous avons en ce moment.

Ce qui s’offre aujourd’hui à nous est une Fonction publique en état de décrépitude totale, en déphasage avec son temps, non performante, lourde et inefficace. Pis, ses agents sont souvent au mieux absents de leurs postes, au pire rackettent les usagers et institutionnalisent la corruption comme mode d’opération.

Le peuple tchadien mérite mieux que ce qu’il a actuellement dans sa Fonction publique : des agents véreux qui pullulent inutilement et prenant en otage l’administration publique sans un rendement bénéfique pour le pays.
Même s’il faut reconnaître à quelques perles rares le mérite de se donner avec abnégation et sincérité aux missions pour lesquelles elles sont avant tout et uniquement recrutées et payées, la masse parasite a malheureusement depuis longtemps phagocyté ce qui reste d’efficacité dans notre administration publique.

Le citoyen lamda a toujours décrié cette Fonction publique moribonde. Des fonctionnaires payés mais qui ne livrent pas la marchandise comme il se doit. Ils sont plus au service de leurs intérêts égoïstes qu’à ceux suprêmes du peuple tchadien.
Sinon, comment comprendre qu’un fonctionnaire qui ne doit vivre que de son salaire dispose de plusieurs somptueuses villas et de voitures cylindrées même s’il se trouve être un commis à la douane, aux impôts ou au trésor !

Comme il est injustifiable pour un employé de la banque de se permettre de disposer de l’argent déposé dans les comptes par les clients, il est tout aussi inconcevable qu’un fonctionnaire dans une régie financière se croit s’assoir sur de masse de liasses et s’en servir à satiété pour assouvir ostentatoirement ses besoins matériels.
Et que dire si l’on vous montre à Ndjamena des propriétés dignes d’un pacha du milieu mafieux appartenir à un simple enseignant!

Il est ainsi difficile pour le Tchadien lamda de pouvoir, aujourd’hui, tracer la ligne de démarcation entre un fonctionnaire et un commerçant. Tous les deux possèdent de grosses voitures, achètent des villas à volonté, sont dans la corruption, dans les mêmes affaires, parfois fréquentent les mêmes charlatans !

Aujourd’hui est donc l’occasion où jamais pour les institutions de la 5e République d’exaucer la prière du peuple tchadien (toutes religions confondues). Un peuple qui ne rêve que d’une Fonction publique dévouée et à ses services et non son racketeur. Et cette ultime prière est bien évidemment celle de voir disparaître à jamais la pratique d’extorsion sciemment entretenue par la horde d’individus qui essaiment actuellement l’appareil étatique. Nous osons croire que la mise en place d’un bon process pourrait efficacement participer à réduire l’hémorragie et nous laisser croire que Rwanda n’est pas si loin que cela.

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